Interview Florence Robin
LIMATECH

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Florence Robin
Présidente et co-fondatrice de LIMATECH

La double implantation à Toulouse et Grenoble nous confère l’avantage de réunir l’excellence des profils toulousains dans le domaine de l’aéronautique et des profils grenoblois spécialisés en électronique. Le choix du Pays Voironnais, et plus spécifiquement du site de Voreppe, s’explique également par la disponibilité  d’infrastructures industrielles adaptées pour mener à bien les projets d’industrialisation de Limatech …

Pouvez-vous présenter l’origine de votre entreprise et décrire son activité ?

Limatech est une start-up industrielle deeptech fondée en 2016 autour d’une même passion et d’une même ambition, celle de révolutionner le secteur aéronautique de l’énergie de stockage embarquée. Cette conviction s’est construite à la jointure de la mécatronique portée par ses 3 fondateurs Florence Robin, Maxime Di Meglio et Marc Béranger alliant leur savoir faire afin de proposer la première batterie au lithium sécurisée européenne et transformant ainsi une innovation disruptive en équipement industriel.

Nos batteries sont conçues pour être plus légères et plus durables que les alternatives traditionnelles au plomb ou nickel-cadmium couramment utilisées dans l’aviation générale. Leur objectif est de fournir des solutions énergétiques plus efficaces et sécurisées, contribuant ainsi à l’avancement technologique dans le domaine de l’aéronautique.

 

Quels sont les domaines d’application et quels sont les marchés visés ?

Les batteries de démarrage lithium de Limatech sont destinées principalement au secteur de l’aéronautique. Cependant, notre technologie innovante et ses avantages environnementaux peuvent également trouver des applications dans d’autres industries nécessitant des sources d’énergie fiables et performantes.

Quant aux marchés visés, la répartition géographique est la suivante : 40 % en Amérique du Nord, 30 % en Europe, 20 % en Asie Pacifique, et 10 % pour le reste du monde. Nos clients se répartissent essentiellement en deux catégories : 20% sont les constructeurs, 80% sont des clients spécialisés dans le remplacement (incluant les centres de maintenance).  Les clients intermédiaires tels que les distributeurs internationaux vont également jouer un rôle. Cette stratégie diversifiée témoigne de la vision mondiale de l’entreprise et de son engagement à s’implanter sur plusieurs continents.

 

Vous avez fait le choix de fabriquer plutôt que d’être « fabless » : quelle est votre stratégie industrielle ?

Cette décision est motivée par une stratégie industrielle spécifique et une vision claire du positionnement sur le marché. Actuellement, la société a atteint un stade avancé dans le développement de prototypes basse tension (24V) du projet ORION.

La stratégie industrielle de Limatech repose sur l’implémentation progressive de sa technologie sur différentes capacités de batterie.

En choisissant de fabriquer ses propres batteries, Limatech a un contrôle direct sur le processus de production, la qualité et l’innovation. Cette approche intégrée renforce la capacité de l’entreprise à répondre rapidement aux évolutions du marché et à adapter ses produits aux besoins spécifiques de l’industrie aéronautique.

En ce qui concerne les liens avec les autres acteurs de la filière, la fabrication interne offre également la possibilité de collaborer étroitement avec les partenaires de la chaîne d’approvisionnement, d’optimiser les processus de production et de garantir une qualité constante. La position de Limatech en tant que fabricant renforce ainsi sa collaboration avec d’autres acteurs clés de l’industrie aéronautique, notamment les constructeurs et les centres de maintenance.

 

La phase d’industrialisation présente des enjeux et des obstacles : pouvez-vous nous expliquer ce que cela implique en particulier pour votre start-up ? Quelles sont les grandes échéances ?

Limatech est actuellement sur une petite capacité industrielle de 5 batteries par jour en adéquation avec sa stratégie de go-to-market. Cette capacité va être progressivement augmentée dès que la commercialisation sera officiellement lancée.

Dans le but de faciliter ce processus, Limatech a pris des mesures stratégiques, dont l’implémentation de la certification EN 9100, un système qualité spécifiquement conçu pour l’aéronautique. Cette certification témoigne de l’engagement de l’entreprise envers des normes élevées de qualité et de conformité, renforçant ainsi sa crédibilité dans le secteur. Limatech a également obtenu l’agrément PART 21G en mars 2023. Cet agrément est obligatoire pour les entreprises qui souhaitent produire des composants pour l’industrie aéronautique européenne. En obtenant cette certification, Limatech s’assure une place parmi les acteurs les plus sérieux et fiables de l’industrie aéronautique : un peu moins de 500 entreprises dans le monde possède ce précieux sésame.

Pour réussir l’industrialisation de ses batteries, Limatech compte capitaliser sur ses savoir-faire existants, sa capacité de certification, ainsi que sur son portefeuille de brevets pour innover et surmonter les obstacles techniques, notamment ceux liés à la numérisation de son Battery Management System (BMS). L’objectif est d’augmenter la productivité et la cadence de production des batteries, ce qui nécessitera des investissements dans des machines spécialisées et des processus optimisés.

Limatech prévoit également d’agrandir ses équipes en recrutant des profils techniques. Cela s’inscrit dans la volonté de disposer des compétences nécessaires pour faire face aux défis de l’industrialisation et garantir le succès de la production à grande échelle.

En termes d’échéances, l’entreprise anticipe des précommandes à partir de 2024. Cela constitue une étape clé dans la stratégie de Limatech pour établir sa présence sur le marché et consolider sa position en tant qu’acteur majeur de l’aéronautique avec ses batteries innovantes.

 

Comment financez-vous cette phase d’industrialisation ?

En phase d’amorçage de son activité, l’entreprise a levé environ 6 millions d’euros par le biais de love money, de business angels, de financements participatifs et de dettes bancaires.

En 2020, nous avons été champions de l’EIC Green Deal (programme H2020) et ainsi obtenu une belle subvention de 2 millions d’euros pour nous permettre de terminer le développement de notre premier produit.

L’entreprise est désormais en phase de scale-up, corrélée à une levée de fonds de série A avec un objectif de 20 millions d’euros en 2024. Nous avons déjà sécurisé 10 millions d’euros auprès de la Banque européenne d’investissement et nous sommes en discussion avancée avec des fonds privés. Dans le cadre du plan France 2030, l’entreprise a également été lauréate de l’appel à projet Première usine en 2022, avec comme perspective la mise en place de notre infrastructure de production à Voreppe en Isère : nous pourrons implanter nos 3 lignes de production et ainsi produire jusqu’à 30 000 batteries par an en 2028.

 

Pourquoi avez-vous fait le choix d’industrialiser dans la région grenobloise, le Pays Voironnais ?

Le choix de la région grenobloise s’inscrit tout d’abord dans une stratégie d’intégration dans des pôles de compétitivité clés pour accompagner son développement. A Toulouse, Limatech est membre de l’Aerospace Valley, le premier pôle de compétitivité mondial de la filière aérospatiale. À Grenoble, elle fait partie de Minalogic, le pôle de compétitivité des technologies du numérique en Auvergne-Rhône-Alpes.

La double implantation à Toulouse et Grenoble lui confère également l’avantage de réunir l’excellence des profils toulousains dans le domaine de l’aéronautique et des profils grenoblois spécialisés en électronique.

Enfin le choix du Pays Voironnais, et plus spécifiquement du site de Voreppe, s’explique également par la disponibilité d’infrastructures industrielles adaptées pour mener à bien les projets d’industrialisation de Limatech (laboratoire de qualification électrique, d’applicatifs de calcul et simulation, d’un laboratoire de prototypage équipé d’imprimantes 3D et de fraiseuses, ainsi que de divers moyens d’essais, de contrôle et d’assemblage).